Vers cinq heures et demie, avant la fermeture des portes, Delaherche était de nouveau retourné à la sous-préfecture, dans son anxiété des conséquences, maintenant qu’il savait la bataille perdue. Il resta là pendant près de trois heures, à piétiner au travers du pavé de la cour, guettant, interrogeant tous les officiers qui passaient ; et ce fut ainsi qu’il apprit les événements rapides : la démission envoyée, puis retirée par le général de Wimpffen, les pleins pouvoirs qu’il avait reçus de l’empereur, pour aller obtenir, du grand quartier prussien, en faveur de l’armée vaincue, les conditions les moins fâcheuses, enfin la réunion d’un conseil de Guerre, chargé de décider si l’on devait essayer de continuer la lutte, en défendant la forteresse. Durant ce conseil, où se trouvaient réunis une vingtaine d’officiers supérieurs, et qui lui parut durer un siècle, le fabricant de drap monta plus de vingt fois les marches du perron. Et, brusquement, à huit heures un quart, il en vit descendre le général de Wimpffen très rouge, les yeux gonflés, suivi d’un colonel et de deux autres généraux. Ils sautèrent en selle, ils s’en allèrent par le pont de Meuse. C’était la capitulation acceptée, inévitable.