Son Excellence Eugène Rougon
Son Excellence Eugène Rougon (paragraphe n°2400)
Chapitre XII
Mais elle eut, ce soir-là, des caprices de toilette extraordinaires. Dans l'abandon où elle laissait sa personne, elle était ainsi prise parfois d'un accès d'idolâtrie pour son corps. Alors, elle inventait des raffinements, nue devant sa glace, se faisant frotter les membres d'onguents, de baumes, d'huiles aromatiques, connus d'elle seule, achetés à Constantinople, chez le parfumeur du sérail, disait-elle, par un diplomate italien de ses amis. Et pendant qu'Antonia la frottait, elle gardait des attitudes de statue. Cela devait lui donner une peau blanche, lisse, impérissable comme le marbre ; une certaine huile surtout, dont elle comptait elle-même les gouttes sur un tampon de flanelle, avait la propriété miraculeuse d'effacer à l'instant les moindres rides. Puis,elle se livrait à un minutieux examen de ses mains et de ses pieds. Elle aurait passé une journée à s'adorer.