Son Excellence Eugène Rougon

Son Excellence Eugène Rougon (paragraphe n°1605)

Chapitre VIII

C'était le marquis et la marquise d'Escorailles. Il se hâta de les recevoir dans son cabinet. Ils s'excusèrent de venir si tard. Puis, dans leur conversation, ils laissèrent entendre qu'ils se trouvaient à Paris depuis deux jours, mais que la peur de voir mal interpréter leur visite chez un personnage tenant de près au gouvernement leur avait fait remettre cette visite à l'heure indue où ils se présentaient. Cette explication ne blessa nullement Rougon. La présence du marquis et de la marquise dans sa maison était pour lui un honneur inespéré. L'empereur en personne aurait frappé à sa porte, qu'il eût éprouvé une satisfaction de vanité moins grande. Ces vieilles gens venant en solliciteurs, c'était tout Plassans qui lui rendait hommage, le Plassans aristocratique, froid, guindé, dont il avait gardé, du fond de sa jeunesse, une idée d'Olympeinaccessible ; et il satisfaisait enfin un rêve d'ambition ancienne, il se sentait vengé des dédains de sa petite ville, lorsqu'il y traînait ses souliers éculés d'avocat sans causes.

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