Son Excellence Eugène Rougon
Son Excellence Eugène Rougon (paragraphe n°1424)
Chapitre VIII
Puis, le fretin des amis s'agitait, s'utilisait le plus possible. Le colonel Jobelin se rendait dans un café des boulevards pour voir d'anciens amis, des officiers ; il les catéchisait, entre deux parties de piquet ; et quand il en avait embauché une demi-douzaine, il se frottait les mains, le soir, en répétant que " toute l'armée était pour la bonne cause ". Monsieur Bouchard se livrait, au ministère, à un racolage semblable ; peu à peu, il avait soufflé aux employés une haine féroce contre monsieur de Marsy ; il gagnait jusqu'aux garçons de bureau, il faisait soupirer tout ce monde dans l'attente d'un âge d'or, dont il parlait à l'oreille de ses intimes. Monsieur d'Escorailles agissait sur la jeunesse riche, auprès de laquelle il vantait les idées larges de Rougon, sa tolérance pour certaines fautes, son amour de l'audace et de la force. Enfin, les Charbonnel eux-mêmes, sur les bancs du Luxembourg, où ils allaient attendre, chaque après-midi, l'issue de leur interminable procès, trouvaient moyen d'enrégimenter les petits rentiers du quartier de l'Odéon.