Pot-Bouille
Pot-Bouille (paragraphe n°3013)
Chapitre XVII
Clotilde avait bien remarqué les attendrissements de son mari, inquiète, irritée contre cette maîtresse qui n'arrivait même pas à faire le bonheur d'un homme, dans son inconduite. Mais elle était, de son côté, très ennuyée d'une aventure déplorable, dont les conséquences révolutionnaient la maison. Clémence, en remontant un matin chercher un mouchoir, venait de surprendreHippolyte avec cet avorton de Louise, sur son propre lit ; et, depuis lors, elle le giflait dans la cuisine au moindre mot, ce qui détraquait le service. Le pis était que madame ne pouvait fermer les yeux davantage sur la situation illégale de sa femme de chambre et de son maître d'hôtel : les autres bonnes riaient, le scandale se répandait chez les fournisseurs, il fallait absolument les marier ensemble, si elle désirait les garder ; et, comme elle continuait à être très contente de Clémence, elle ne songeait plus qu'à ce mariage. La négociation lui semblait si délicate, avec des amoureux qui se rouaient de coups, qu'elle résolut d'en charger encore l'abbé Mauduit, dont le rôle moralisateur paraissait tout indiqué dans la circonstance. Du reste, ses domestiques lui donnaient beaucoup de mal, depuis quelque temps. A la campagne, elle s'était aperçue de la liaison de son grand galopin de Gustave avec Julie ; un instant, elle avait voulu renvoyer cette dernière, à regret, car elle aimait sa cuisine ; puis, après de sages réflexions, elle l'avait gardée, préférant que le galopin eût une maîtresse chez elle, une fille propre qui ne serait jamais un embarras. Au-dehors, on ne sait pas ce qu'un jeune homme peut empoigner, quand il commence trop jeune. Elle les surveillait donc, sans rien dire ; et il fallait, maintenant, que les deux autres vinssent l'occuper de leur histoire !