Nana
Nana (paragraphe n°1199)
Chapitre VI
Les deux hommes se serrèrent la main. Muffat demeura un instant sans parler, la face dans l'ombre. Steiner paraissait maussade. On causa de Paris ; les affaires ne marchaient pas, il y avait eu à la Bourse des abominations. Au bout d'un quart d'heure, Muffat prit congé. Et, comme la jeune femme l'accompagnait, il demanda, sans l'obtenir, un rendez-vous pour la nuit suivante. Steiner, presque aussitôt, monta se coucher, en grognant contre les éternels bobos des filles. Enfin, les deux vieux étaient emballés ! Lorsqu'elle put le rejoindre, Nana trouva Georges toujours bien sage, derrière son rideau. La chambre était noire. Il l'avait fait tomber par terre, assise près de lui, et ils jouaient ensemble à se rouler, s'arrêtant, étouffant leurs rires sous des baisers, lorsqu'ils donnaient contre un meuble un coup de leurs pieds nus. Au loin, sur la route de Gumières, le comteMuffat s'en allait lentement, son chapeau à la main, baignant sa tête brûlante dans la fraîcheur et le silence de la nuit.