Le Ventre de Paris

Le Ventre de Paris (paragraphe n°873)

Chapitre IV

Ce fut dans la cave du pavillon aux volailles qu'ils trouvèrent moyen de coucher encore ensemble. C'était une habitude douce, une sensation de bonne chaleur, une façon de s'endormir l'un contre l'autre, qu'ils ne pouvaient perdre. Il y avait là, près des tables d'abattage, de grands paniers de plume dans lesquels ils tenaient à l'aise. Dès lanuit tombée, ils descendaient, ils restaient toute la soirée, à se tenir chaud, heureux des mollesses de cette couche, avec du duvet par-dessus les yeux. Ils traînaient d'ordinaire leur panier loin du gaz ; ils étaient seuls, dans les odeurs fortes des volailles, tenus éveillés par de brusques chants de coq qui sortaient de l'ombre. Et ils riaient, ils s'embrassaient, pleins d'une amitié vive qu'ils ne savaient comment se témoigner. Marjolin était très bête. Cadine le battait, prise de colère contre lui, sans savoir pourquoi. Elle le dégourdissait par sa crânerie de fille des rues. Lentement, dans les paniers de plumes, ils en surent long. C'était un jeu. Les poules et les coqs qui couchaient à côté d'eux n'avaient pas une plus belle innocence.

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