Le Ventre de Paris
Le Ventre de Paris (paragraphe n°126)
Chapitre I
Claude et Florent revinrent sur leurs pas, flânant, s'attardant au milieu des fleurs. Ils s'arrêtèrent curieusement devant des femmes qui vendaient des bottes de fougère et des paquets de feuilles de vigne, bien réguliers, attachés par quarterons. Puis ils tournèrent dans un bout de rue couverte, presque désert, où leurs pas sonnaient comme sous la voûte d'une église. Ils y trouvèrent, attelé à une voiture grande comme une brouette, un tout petit âne qui s'ennuyait sans doute, et qui se mit à braire en les voyant, d'un ronflement si fort et si prolongé, que les vastes toitures des Halles en tremblaient. Des hennissements de chevaux répondirent ; il y eut des piétinements, tout un vacarme au loin, qui grandit, roula, alla se perdre. Cependant, en face d'eux, rue Berger, les boutiques nues des commissionnaires, grandes ouvertes, montraient, sous la clarté du gaz, des amas de paniers et de fruits, entre les trois murs sales couverts d'additions au crayon. Et comme ils étaient là,ils aperçurent une dame bien mise, perdu au milieu de l'encombrement de la chaussée, et filant sournoisement.