Le Ventre de Paris

Le Ventre de Paris (paragraphe n°1045)

Chapitre V

Alors, il lui prit le bras, il l'emmena, sans qu'elle résistât. Ils traversèrent la rue Rambuteau, suivirent le large trottoir des Halles, allèrent jusque chez un épicier de la rue de la Cossonnerie, qui avait la renommée des cornets. Les cornets sont de minces cornets de papier, où les épiciers mettent les débris de leur étalage, les dragées cassées, les marrons glacés tombés en morceaux, les fonds suspects des bocaux de bonbons. Muche fit les choses galamment ; il laissa choisir le cornet par Pauline, un cornet de papier bleu, ne le lui reprit pas, donna son sou. Sur le trottoir, elle vida les miettes de toutes sortes dans les deux poches de son tablier ; et ces poches étaient si étroites qu'elles furent pleines. Elle croquait doucement, miette par miette, ravie, mouillant son doigt, pour avoir la poussière trop fine ; si bien que cela fondait les bonbons, et que deux taches brunes marquaient déjà les deux poches du tablier. Muche avait un rire sournois.Il la tenait par la taille, la chiffonnant à son aise, lui faisant tourner le coin de la rue Pierre-Lescot, du côté de la place des Innocents, en lui disant :

?>