Le Rêve
Le Rêve (paragraphe n°911)
Chapitre XII
Puis, si les voyages nous fatiguent, nous reviendrons ici, nous relèverons les murs du château d'Hautecœur, et nous y achèverons nos jours. C'est mon rêve... Toute notre fortune, s'il le faut, y sera jetée, à main ouverte. De nouveau, le donjon commandera aux deux vallées. Nous habiterons le logis d'honneur, entre la tour de David et la tour de Charlemagne. Le colosse en entier sera rétabli, comme aux jours de sa puissance, les courtines, les bâtiments, la chapelle, dans le luxe barbare d'autrefois... Et je veux que nous y menions l'existence des temps anciens, vous princesse, et moi prince, au milieu d'une suite d'hommes d'armes et de pages. Nosmurailles de quinze pieds d'épaisseur nous isoleront, nous serons dans la légende... Le soleil baisse derrière les coteaux, nous revenons d'une chasse, sur de grands chevaux blancs, parmi le respect des villages agenouillés. Le cor sonne, le pont-levis s'abaisse. Des rois, le soir, sont à notre table. La nuit, notre couche est sur une estrade, surmontée d'un dais, comme un trône. Des musiques jouent, lointaines, très douces, tandis que nous nous endormons aux bras l'un de l'autre, dans la pourpre et l'or.