Le Rêve

Le Rêve (paragraphe n°598)

Chapitre IX

Mais déjà Angélique, après un rapide bonsoir à Hubert et à l'abbé Cornille, montait dans sa chambre, éperdue, tellement elle avait senti son secret au bord de ses lèvres. Si sa mère l'avait gardée une seconde encore contre son cœur, elle aurait parlé. Quand elle se fut enfermée à double tour, la lumière la blessa, elle souffla sa bougie. La lune se levait de plus en plus tard, la nuit était très sombre. Et, sans se déshabiller, assise devant la fenêtre ouverte sur les ténèbres, elle attendit pendant des heures. Les minutes s'écoulaient remplies, la même idée suffisait à l'occuper : elle descendrait le rejoindre, quand minuit sonnerait. Cela se ferait très naturellement, elle se voyait agir, pas à pas, geste à geste, avec cette aisance qu'on a dans les songes. Presque tout de suite, elle avait entendu partir l'abbé Cornille. Ensuite, les Hubert étaient montés à leur tour. Deux fois, il lui sembla que leur chambre se rouvrait, que des pieds furtifs s'avançaientjusqu'à l'escalier, comme si quelqu'un fût venu écouter là, un instant. Puis, la maison parut s'anéantir dans un sommeil profond.

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