Le Rêve

Le Rêve (paragraphe n°1042)

Chapitre XIV

L'abbé Cornille, après être descendu de l'autel, fit l'exhortation, d'une voix amie. Il donna en exemple le mariage que Jésus avait contracté avec l'Eglise, il parla de l'avenir, des jours à vivre dans la foi, des enfants qu'il faudrait élever en chrétiens ; et là, de nouveau, en face de cet espoir, Angélique sourit ; tandis que Félicien, près d'elle, frémissait, à l'idée de tout ce bonheur, qu'il croyait fixé maintenant. Puis, vinrent les demandes du rituel, les réponses qui lient pour l'existence entière, le " oui " décisif, qu'elle prononça, émue, du fond de son cœur, qu'il dit plus haut, avec une gravité tendre. L'irrévocable était fait, le prêtre avait mis leurs mains droites l'une dans l'autre, en murmurant la formule : Ego conjungo vos in matrimonium, in nomine Patri et Filii, et Spiritus sancti. Mais il restait à bénir l'anneau, qui est le symbole de la fidélité inviolable, de l'éternité du lien ; et cela dura. Dans le bassin d'argent, au-dessus de l'anneau d'or, le prêtre agitait l'aspersoir, en forme de croix. " Benedic, Domine, annulum hunc... " Ensuite, il le présenta à l'époux, pour lui témoigner que l'Eglise scellait et cachetait son cœur, où aucune autre femme ne devait plus entrer ; et l'époux le mit au doigt de l'épouse, afin de lui apprendre à son tour que, seul parmi les hommes, il existait pour elle désormais. C'était l'union étroite, sans fin, le signe de dépendance porté par elle, qui lui rappellerait constamment la foi jurée ; c'était aussila promesse d'une longue suite d'années communes, comme si ce petit cercle d'or les attachait jusqu'à la tombe. Et, tandis que le prêtre, après les oraisons finales, les exhortait une fois encore, Angélique avait son clair sourire de renoncement, elle qui savait.

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