Le Docteur Pascal
Le Docteur Pascal (paragraphe n°1071)
Chapitre IX
Mais, comme il le lui avait avoué très bas, une nuit, ce n'étaient guère, désormais, que des tournées de soulagement et de consolation. Déjà, autrefois, s'il avait fini par ne plus exercer qu'avec répugnance, cela venait de ce qu'il sentait tout le vide de la thérapeutique. L'empirisme le désolait. Du moment que la médecine n'était pas une science expérimentale, mais un art, il demeurait inquiet devant l'infinie complication de la maladie et du remède, selon le malade. Les médications changeaient avec les hypothèses : que de gens avaient dû tuer jadis les méthodes aujourd'hui abandonnées ! Le flair du médecin devenait tout, le guérisseur n'était plus qu'un devin heureusement doué, marchant lui-même à tâtons, enlevant les cures au petit bonheur de son génie. Et cela expliquait pourquoi, après une douzaine d'années d'exercice, il avait à peu près abandonné sa clientèle pour se jeter dans l'étude pure. Puis, lorsque ses grands travaux sur l'hérédité l'avaient ramené un instant à l'espoir d'intervenir, de guérir par ses piqûres hypodermiques, il s'était de nouveau passionné, jusqu'au jour où sa foi en la vie, qui le poussait à en aider l'action, en réparant les forces vitales, s'était élargie encore, lui avait donné lacertitude supérieure que la vie se suffisait, était l'unique faiseuse de santé et de force. Et il ne continuait ses visites, avec son tranquille sourire, qu'auprès des malades qui le réclamaient à grands cris et qui se trouvaient miraculeusement soulagés, même lorsqu'il les piquait avec de l'eau claire.