La Terre
La Terre (paragraphe n°1710)
Partie : TROISIEME PARTIE, chapitre IV
Il n'y eut plus qu'elle qui travaillât, dans la plaine embrasée. Si elle ne rapportait point ses trente sous, le soir, Hilarion la battrait ; car non seulement il la tuait de ses appétits de brute, il la volait aussi à présent pour se griser d'eau-de-vie. Mais ses forces dernières la trahissaient. Son corps plat, sans gorge ni fesses, raboté comme une planche par le travail, craquait, près de se rompre, à chaque nouvelle gerbe ramassée et liée. Et, le visage couleur de cendre, mangé ainsi qu'un vieux sou, vieille de soixante ans à trente-cinq, elle achevait de laisser boire sa vie au brûlant soleil, dans cet effort désespéré de la bête de somme, qui va choir et mourir.