La Terre
La Terre (paragraphe n°1575)
Partie : TROISIEME PARTIE, chapitre III
La Trouille, sans une parole, habituée à ces courses, galopait avec des sauts de chèvre. L'ordinaire tactique deson père était de la ramener ainsi à la maison, où il l'enfermait. Aussi essayait-elle de s'échapper vers la plaine, espérant le lasser. Cette fois, elle faillit réussir, grâce à une rencontre. Depuis un instant, monsieur Charles et Elodie, qu'il menait à la fête, étaient là, arrêtés, plantés au milieu de la route. Ils avaient tout vu, la petite les yeux écarquillés de stupéfaction innocente, lui rouge de honte, crevant d'indignation bourgeoise. Et le pis encore fut que cette Trouille impudique, en le reconnaissant, voulut se mettre sous sa protection. Il la repoussa, mais le fouet arrivait ; et, pour l'éviter, elle tourna autour de son oncle et de sa cousine, tandis que son père, avec des jurons et des mots de caserne, lui reprochait sa conduite, tournant, lui aussi, claquant à la volée, de toute la vigueur de son bras. Monsieur Charles, emprisonné dans ce cercle abominable, étourdi, ahuri, dut se résigner à enfoncer la face d'Elodie dans son gilet. Et il perdait la tête à ce point, qu'il devint lui-même très grossier.