La Fortune des Rougon

La Fortune des Rougon (paragraphe n°898)

Partie : Préface, chapitre V

Ce fut ainsi qu'ils se rencontrèrent pour la première fois dans ce coin perdu où ils devaient passer de si bonnes heures. A partir de cette soirée, ils se virent là presque chaque nuit. Le puits ne leur servit plus qu'à s'avertir des obstacles imprévus mis à leurs rendez-vous, des changements d'heure, de toutes les petites nouvelles, grosses à leurs yeux, et ne souffrant pas de retard ; il suffisait que celui qui avait à faire une communication à l'autre mit en mouvement la poulie, dont le bruit strident s'entendait de fort loin. Mais bien que certains jours il s'appelassent deux ou trois fois pour se dire des riens d'une énorme importance, ils ne goûtaient leurs vraies joies que le soir dans l'allée discrète. Miette était d'une ponctualité rare. Elle couchait heureusement au-dessus de la cuisine, dans une chambre où l'on serrait, avant sonarrivée, les provisions d'hiver, et à laquelle conduisait un petit escalier particulier. Elle pouvait ainsi sortir à toute heure sans être vue du père Rébufat ni de Justin. Elle comptait d'ailleurs, si ce dernier la voyait jamais rentrer, lui faire quelque histoire, en le regardant de cet air dur qui lui fermait la bouche.

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