La Fortune des Rougon

La Fortune des Rougon (paragraphe n°1262)

Partie : Préface, chapitre VI

Elle devinait juste. L'impopularité brusque des Rougon était l'œuvre d'un groupe d'avocats qui se trouvaient très vexés de l'importance qu'avait prise un ancien marchand d'huile, illettré, et dont la maison avait risqué la faillite. Le quartier Saint-Marc, depuis deux jours, était comme mort. Le vieux quartier et la ville neuve restaient seuls en présence. Cette dernière avait profité de la panique pour perdre le salon jaune dans l'esprit des commerçants et des ouvriers. Roudier et Granoux étaient d'excellents hommes, d'honorables citoyens, que ces intrigants de Rougon trompaient. Onleur ouvrirait les yeux. A la place de ce gros ventru, de ce gueux qui n'avait pas le sou, monsieur Isidore Granoux n'aurait-il pas dû s'asseoir dans le fauteuil du maire ? Les envieux partaient de là pour reprocher à Rougon tous les actes de son administration qui ne datait que de la veille. Il n'aurait pas dû garder l'ancien conseil municipal ; il avait commis une sottise grave en faisant fermer les portes ; c'était par sa bêtise que cinq membres avaient pris une fluxion de poitrine sur la terrasse de l'hôtel Valqueyras. Et ils ne tarissaient pas. Les républicains, eux aussi, relevaient la tête. On parlait d'un coup de main possible, tenté sur la mairie par les ouvriers du faubourg. La réaction râlait.

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