La Faute de l'Abbé Mouret

La Faute de l'Abbé Mouret (paragraphe n°471)

Partie : Livre 1, chapitre XII

Et il parla de régler les heures du catéchisme. Mais l'abbé Mouret répondait d'une façon distraite. Il regardait le village, à ses pieds, sous le soleil couchant. Les paysans rentraient, des hommes muets, marchant lentement, du pas des bœufs harassés qui regagnent l'écurie. Devant les masures, les femmes debout jetaient un appel, causaient violemment d'une porte à une autre, tandis que des bandes d'enfants emplissaient la route du tapage de leurs gros souliers, se poussant, se roulant, se vautrant. Une odeur humaine montait de ce tas de maisons branlantes. Et le prêtre se croyait encore dans la basse-cour de Désirée, en face d'un pullulement de bêtes sans cesse multipliées. Il retrouvait là la même chaleur de génération, les mêmes couches continues, dont la sensation lui avait causé un malaise. Vivant depuis le matin dans cette histoire de la grossesse de Rosalie, il finissait par penser à cela, aux saletés de l'existence, aux poussées de la chair, à la reproduction fatale de l'espèce semant les hommes comme des grains de blé. Les Artaud étaient un troupeau parqué entre les quatre collines de l'horizon, engendrant, s'étalant davantage sur le sol, à chaque portée des femelles.

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