La Faute de l'Abbé Mouret
La Faute de l'Abbé Mouret (paragraphe n°352)
Partie : Livre 1, chapitre X
Mais, à mesure qu'il avançait, l'abbé était pris d'une autre inquiétude. La Teuse allait le recevoir d'une belle façon, avec son déjeuner froid qui devait attendre depuis près de deux heures. Il s'imaginait son terrible visage, le flot de paroles dont elle l'accueillerait, les bruits irrités de vaisselle qu'il entendrait l'après-midi entier. Quand il eut traversé les Artaud, sa peur devint si vive, qu'il hésita, pris de lâcheté, se demandant s'il ne serait pas plus prudent de faire le tour et de rentrer par l'église. Mais, comme il se consultait, la Teuse en personne parut, au seuil du presbytère, le bonnet de travers, les poings auxhanches. Il courba le dos, il dut monter la pente sous ce regard gros d'orage, qu'il sentait peser sur ses épaules.