La Faute de l'Abbé Mouret

La Faute de l'Abbé Mouret (paragraphe n°2020)

Partie : Livre 3, chapitre XV

C'était vers une heure seulement qu'un paysan, venu à Plassans pour vendre ses légumes, avait appris au docteur Pascal la mort d'Albine, en ajoutant que Jeanbernat le demandait. Maintenant, le docteur se sentait un peu soulagé par le cri qu'il venait de jeter, en passant devant l'église. Il s'était détourné de son chemin, afin de se donner cette satisfaction. Il se reprochait cette mort comme un crime dans lequel il aurait trempé. Tout le long de la route, il n'avait cessé de s'accabler d'injures, s'essuyant les yeux pour voir clair à conduire son cheval, poussant le cabriolet sur les tas de pierres, avec la sourdeenvie de culbuter et de se casser quelque membre. Lorsqu'il se fut engagé dans le chemin creux longeant la muraille interminable du parc, une espérance lui vint. Peut-être qu'Albine n'était qu'en syncope. Le paysan lui avait conté qu'elle s'était asphyxiée avec des fleurs. Ah ! s'il arrivait à temps, s'il pouvait la sauver ! Et il tapait férocement sur son cheval, comme s'il eût tapé sur lui.

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