La Faute de l'Abbé Mouret
La Faute de l'Abbé Mouret (paragraphe n°1484)
Partie : Livre 3, chapitre III
Vraiment, il faut vivre au fond d'un pays de loups pour voir des choses pareilles. Est-ce que, dans lesvillages honnêtes, on se marie jamais aux chandelles ? Ça montre assez que tous ces Artaud sont des pas-grand-chose... Moi, en Normandie, j'ai vu des noces qui mettaient les gens en l'air, à deux lieues à la ronde. On mangeait pendant trois jours. Le curé en était ; le maire aussi ; même, à la noce d'une de mes cousines, les pompiers sont venus. Et l'on s'amusait donc !... Mais faire lever un prêtre avant le soleil pour s'épouser à une heure où les poules elles-mêmes sont encore couchées, il n'y a pas de bon sens ! A votre place, monsieur le curé, j'aurais refusé... Pardi ! vous n'avez pas assez dormi, vous avez peut-être pris froid dans l'église. C'est ça qui vous a tout retourné. Ajoutez qu'on aimerait mieux marier des bêtes que cette Rosalie et son gueux, avec leur mioche qui a pissé sur une chaise... Vous avez tort de ne pas me dire où vous vous sentez mal. Je vous ferais quelque chose de chaud... Hein ? monsieur le curé, répondez-moi ?