La Débâcle
La Débâcle (paragraphe n°1660)
Partie : DEUXIEME PARTIE, chapitre V
Il plaisantait avec Jean, tous deux ragaillardis par cette belle bravoure calme des artilleurs. Mais, en trois coups, les batteries prussiennes venaient de régler leur tir : d'abord trop long, il était devenu d'une telle précision, que les obus tombaient sur les pièces françaises ; tandis que celles-ci, malgré les efforts pour allonger la portée, n'arrivaient toujours pas. Un des servants d'Honoré, celui de la bouche, à gauche, fut tué. On poussa le corps, le service continua avec la même régularité soigneuse, sans plus de hâte. De toutes parts, les projectiles pleuvaient, éclataient ; et c'étaient, autour de chaque pièce, les mêmes mouvements méthodiques, la gargousse et l'obus introduits, la hausse réglée, le coup tiré, les roues ramenées, comme si ce travail avait absorbé les hommes au point de les empêcher de voir et d'entendre.