La Débâcle
La Débâcle (paragraphe n°1326)
Partie : DEUXIEME PARTIE, chapitre III
Des heures s'écoulèrent, elle s'inquiétait maintenant des lointaines lueurs aperçues dans la campagne, par-dessus les remparts. Il faisait si sombre, qu'elle tâchait de reconstituer les lieux. En bas, cette grande nappe pâle, c'étaient bien les prairies inondées. Alors, quel était donc ce feu, qu'elle avait vu briller et s'éteindre, là-haut, sansdoute sur la Marfée ? Et, de toutes parts, il en flambait d'autres, à Pont-Maugis, à Noyers, à Frénois, des feux mystérieux qui vacillaient comme au-dessus d'une multitude innombrable, pullulant dans l'ombre. Puis, davantage encore, des rumeurs extraordinaires la faisaient tressaillir, le piétinement d'un peuple en marche, des souffles de bêtes, des chocs d'armes, toute une chevauchée au fond de ces ténèbres d'enfer. Brusquement, éclata un coup de canon, un seul, formidable, effrayant dans l'absolu silence qui suivit. Elle en eut le sang glacé. Qu'était-ce donc ? Un signal sans doute, la réussite de quelque mouvement, l'annonce qu'ils étaient prêts, là-bas, et que le soleil pouvait paraître.