La Curée

La Curée (paragraphe n°1372)

Chapitre VI

Elle s'aperçut dans la haute glace de l'armoire. Elle s'approcha, étonnée de se voir, oubliant son mari, oubliant Maxime, toute préoccupée par l'étrange femme qu'elle avait devant elle. La folie montait. Ses cheveux jaunes, relevés sur les tempes et sur la nuque, lui parurentune nudité, une obscénité. La ride de son front se creusait si profondément, qu'elle mettait une barre sombre au-dessus des yeux, la meurtrissure mince et bleuâtre d'un coup de fouet. Qui donc l'avait marquée ainsi ? Son mari n'avait pas levé la main, pourtant. Et ses lèvres l'étonnaient par leur pâleur, ses yeux de myope lui semblaient morts. Comme elle était vieille ! Elle pencha le front, et quand elle se vit dans son maillot, dans sa légère blouse de gaze, elle se contempla, les cils baissés, avec des rougeurs subites. Qui l'avait mise nue ? que faisait-elle dans ce débraillé de fille qui se découvre jusqu'au ventre ? Elle ne savait plus. Elle regardait ses cuisses que le maillot arrondissait, ses hanches dont elle suivait les lignes souples sous la gaze, son buste largement ouvert ; et elle avait honte d'elle, et un mépris de sa chair l'emplissait d'une colère sourde contre ceux qui la laissaient ainsi, avec de simples cercles d'or aux chevilles et aux poignets pour lui cacher la peau.

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