La Bête humaine
La Bête humaine (paragraphe n°843)
Chapitre V
Et il poussa devant elle un petit guéridon, en cessant de la regarder, pour ne point l'effrayer trop. Elle avait frémi : il voulait une page de son écriture, afin de la comparer à la lettre. Un instant, elle chercha désespérément un prétexte, résolue à ne pas écrire. Puis, elle réfléchit : à quoi bon ? puisqu'il savait. On aurait toujours quelques lignes d'elle. Sans aucun trouble apparent, de l'air le plus simple du monde, elle écrivit ce qu'il demandait ; tandis que, debout derrière elle, il reconnaissait parfaitement l'écriture, plus haute, moins tremblée que celle du billet. Et il finissait par la trouver très brave, cette petite femme fluette ; il souriait de nouveau, maintenant qu'elle ne pouvait le voir, de son sourire d'homme que le charme seul touchait encore, dans son insouciance expérimentée de toutes choses. Au fond, rien ne valait la fatigue d'être juste. Il veillait uniquement au décor du régime qu'il servait.