La Bête humaine

La Bête humaine (paragraphe n°2034)

Chapitre XII

En moins d'une semaine, monsieur Denizet termina l'instruction. Il trouvait dans la Compagnie de l'Ouest une bonne volonté extrême, tous les documents désirables, tous les témoignages utiles ; car elle aussi souhaitait vivement d'en finir, avec cette déplorable histoire d'un de ses employés, qui, remontant à travers les rouages compliqués de son organisme, avait failli ébranler jusqu'à son Conseil d'administration. Il fallait au plus vite couper le membre gangrené. Aussi, de nouveau, défilèrent dans le cabinet du juge le personnel de la gare du Havre, monsieur Dabadie, Moulin et les autres, qui donnèrent des détails désastreux sur la mauvaise conduite de Roubaud ; puis, le chef de gare de Barentin, monsieur Bessière, ainsi que plusieurs employés de Rouen, dont les dépositions avaient une importance décisive, relativement au premier meurtre ; puis, monsieur Vandorpe, le chef de gare de Paris, le stationnaire Misard et le conducteur-chef Henri Dauvergne, ces deux derniers très affirmatifs sur les complaisances conjugales duprévenu. Même Henri, que Séverine avait soigné à la Croix-de-Maufras, racontait qu'un soir, affaibli encore, il croyait avoir entendu les voix de Roubaud et de Cabuche se concertant devant sa fenêtre ; ce qui expliquait bien des choses et renversait le système des deux accusés, lesquels prétendaient ne pas se connaître. Dans tout le personnel de la Compagnie, un cri de réprobation s'était élevé, on plaignait les malheureuses victimes, cette pauvre jeune femme dont la faute avait tant d'excuses, ce vieillard si honorable, aujourd'hui lavé des vilaines histoires qui couraient sur son compte.

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