C'était le tableau de Fagerolles. Et il retrouvait son Plein Air, dans ce Déjeuner, la même note blonde, la même formule d'art, mais combien adoucie, truquée, gâtée, d'une élégance d'épiderme, arrangée avec une adresse infinie pour les satisfactions basses du public. Fagerolles n'avait pas commis la faute de mettre ses trois femmes nues ; seulement, dans leurs toilettes osées de mondaines, il les avait déshabillées, l'une montrant sa gorge sous la dentelle transparente du corsage, l'autre découvrant sa jambe droite jusqu'au genou, en se renversant pour prendre une assiette, la troisième qui ne livrait pas un coin de sa peau, vêtue d'une robe si étroitement ajustée, qu'elle en était troublante d'indécence, avec sa croupe tendue de cavale. Quant aux deux messieurs, galants, en vestons de campagne, ils réalisaient le rêve du distingué ; tandis qu'un valet, au loin, tirait encore un panier du landau, arrêté derrière les arbres. Tout cela, les figures, les étoffes, la nature morte du déjeuner, s'enlevait gaiement en plein soleil, sur les verdures assombries du fond ; et l'habileté suprême était dans cette forfanterie d'audace, dans cette force menteuse qui bousculait juste assez la foule, pour la faire se pâmer. Une tempête dans un pot de crème.