L'Œuvre
L'Œuvre (paragraphe n°1449)
Chapitre VIII
Après le refus de son troisième tableau, l'été fut si miraculeux, cette année-là, que Claude sembla y puiser une nouvelle force. Pas un nuage, des journées limpides sur l'activité géante de Paris. Il s'était remis à courir la ville, avec la volonté de chercher un coup, comme il le disait : quelque chose d'énorme, de décisif, il ne savait pas au juste. Et, jusqu'à septembre, il ne trouva rien, se passionnant pendant une semaine pour un sujet, puis déclarant que ce n'était pas encore ça. Il vivait dans un continuel frémissement, aux aguets, toujours à la minute de mettre la main sur cette réalisation de son rêve, qui fuyait toujours. Au fond, son intransigeance de réaliste cachait des superstitions de femme nerveuse, il croyait à des influences compliquées et secrètes : tout allait dépendre de l'horizon choisi, néfaste ou heureux.