L'Œuvre

L'Œuvre (paragraphe n°1426)

Chapitre VII

Oh ! Schumann, le désespoir, la jouissance du désespoir ! Oui, la fin de tout, le dernier chant d'une pureté triste, planant sur les ruines du monde !... Oh ! Wagner, le dieu, en qui s'incarnent des siècles de musique ! Son œuvre est l'arche immense, tous les arts en un seul, l'humanité vraie des personnages exprimée enfin, l'orchestre vivant à part la vie du drame ; et quel massacre des conventions, des formules ineptes ! quel affranchissement révolutionnaire dans l'infini !... L'ouverture du Tannhäuser, ah ! c'est l'alléluia sublime du nouveau siècle : d'abord, le chant des pèlerins, le motif religieux, calme, profond, à palpitations lentes ; puis, les voix des sirènes qui l'étouffent peu à peu, les voluptés de Vénus pleines d'énervantes délices, d'assoupissantes langueurs, de plus en plus hautes et impérieuses, désordonnées ; et, bientôt, le thème sacré qui revient graduellement comme une aspiration de l'espace, qui s'empare de tous les chants et les fond en une harmonie suprême, pour les emporter sur les ailes d'un hymne triomphal !

?>