L'Assommoir
L'Assommoir (paragraphe n°1801)
Partie : Préface de l'auteur, chapitre XI
Nana riait alors d'un rire qui lui pinçait drôlement la bouche. Non, non, les hommes ne lui parlaient pas. Elle marchait trop vite. Puis, qu'est-ce qu'ils lui auraient dit ? elle n'avait rien à démêler avec eux, peut-être ! Et elle expliquait ses retards d'un air de niaise : elle s'était arrêtée pour regarder les images, ou bien elle avait accompagné Pauline qui savait des histoires. On pouvait la suivre, si on ne la croyait pas ; elle ne quittait même jamais le trottoir de gauche ; et elle filait joliment, elle devançait toutes les autres demoiselles, comme une voiture. Un jour, à la vérité, madame Lerat l'avait surprise, rue du Petit-Carreau, le nez en l'air, riant avec trois autres traînées de fleuristes, parce qu'un homme sefaisait la barbe, à une fenêtre ; mais la petite s'était fâchée, en jurant qu'elle entrait justement chez le boulanger du coin acheter un pain d'un sou.