L'Argent

L'Argent (paragraphe n°2166)

Chapitre XII

Gundermann avait raison, décidément : ça ne vaut rien, la fièvre, à la Bourse... Ah ! le gredin, est-il heureux, lui, de n'avoir plus ni sang, ni nerfs, de ne plus pouvoir coucher avec une femme, ni boire une bouteille de bourgogne ! Je crois d'ailleurs qu'il a toujours été comme ça, ses veines charrient de la glace... Moi, je suis trop passionné, c'est évident. La raison de ma défaite n'est pas ailleurs, voilà pourquoi je me suis si souvent cassé les reins. Et il faut ajouter que, si ma passion me tue, c'est aussi ma passion qui me fait vivre. Oui, elle m'emporte, elle me grandit, me pousse très haut, et puis elle m'abat, elle détruit d'un coup toute son œuvre. Jouir n'est peut-être que se dévorer... Certainement, quand je songe à ces quatre ans de lutte, je vois bien que tout cequi m'a trahi, c'est tout ce que j'ai désiré, tout ce que j'ai possédé... Ça doit être incurable, ça. Je suis fichu.

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