L'Argent
L'Argent (paragraphe n°1856)
Chapitre X
Une heure plus tard, comme Daigremont, qui dînait en ville, allait s'habiller, il reçut une autre visite, celle de la baronne Sandorff. Dans son désarroi, elle venait d'avoir l'inspiration de le consulter. On l'avait un instant dite sa maîtresse ; mais, réellement, il n'y avait eu entre eux qu'une camaraderie très libre d'homme à femme. Tous deux étaient trop félins, se devinaient trop, pour en arriver à la duperie d'une liaison. Elle conta ses craintes, la démarche chez Gundermann, la réponse de celui-ci, en mentant d'ailleurs sur la fièvre de trahison qui l'avaitpoussée. Et Daigremont s'égaya, s'amusa à l'effarer davantage, l'air ébranlé, près de croire que Gundermann disait vrai, quand il jurait qu'il n'était pas à la baisse ; car est-ce qu'on sait jamais ? c'est un vrai bois que la Bourse, un bois par une nuit obscure, où chacun marche à tâtons. Dans ces ténèbres, si l'on a le malheur d'écouter tout ce qu'on invente d'inepte et de contradictoire, on est certain de se casser la figure.