L'Argent
L'Argent (paragraphe n°1741)
Chapitre X
Du coup, Moser arrondit des yeux effarés. Depuis longtemps, le gros commérage de la Bourse était que Gundermann guettait Saccard, qu'il nourrissait la baisse contre l'Universelle, en attendant d'étrangler celle-ci, à quelque fin de mois, d'un effort brusque, lorsque l'heure serait venue d'écraser le marché sous ses millions ; et, si cette journée s'annonçait si chaude, c'était que tous croyaient, répétaient que la bataille allait enfin être pour ce jour-là, une de ces batailles sans merci où l'une des deux armées reste par terre, détruite. Mais est-ce qu'on était jamais certain, dans ce monde de mensonge et de ruse ? Les choses les plus sûres, les plus annoncées à l'avance, devenaient, au moindre souffle, des sujets de doute pleins d'angoisse.