L'Argent

L'Argent (paragraphe n°14)

Chapitre I

Dans cette indifférence qu'on lui témoignait, Saccard était resté les regards fiévreux et provocants, achevant le tour de la salle. Et il n'échangea plus un signe de tête qu'avec un grand jeune homme, assis à trois tables de distance, le beau Sabatani, un Levantin, à la face longue et brune, qu'éclairaient des yeux noirs magnifiques, maisqu'une bouche mauvaise, inquiétante, gâtait. L'amabilité de ce garçon acheva de l'irriter : quelque exécuté d'une Bourse étrangère, un de ces gaillards mystérieux aimés des femmes, tombé depuis le dernier automne sur le marché, qu'il avait déjà vu à l'œuvre comme prête-nom, dans un désastre de banque, et qui peu à peu conquérait la confiance de la corbeille et de la coulisse, par beaucoup de correction et une bonne grâce infatigable, même pour les plus tarés.

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