Germinal
Germinal (paragraphe n°953)
Partie : Troisième partie, chapitre II
Outre le lapin aux pommes de terre, qu'ils engraissaient dans le carin depuis un mois, les Maheu avaient une soupe grasse et le bœuf. La paie de quinzaine était justement tombée la veille. Ils ne se souvenaient pas d'un pareil régal. Même à la dernière Sainte-Barbe, cette fête des mineurs où ils ne font rien de trois jours, le lapin n'avait pas été si gras ni si tendre. Aussi les dix paires de mâchoires, depuis la petite Estelle dont les dents commençaient à pousser, jusqu'au vieux Bonnemort en train de perdre les siennes, travaillaient d'un tel cœur, que les os eux-mêmes disparaissaient. C'était bon, la viande ; mais ils la digéraient mal, ils en voyaient trop rarement. Tout y passa, il ne resta qu'un morceau de bouilli pour le soir. On ajouterait des tartines, si l'on avait faim.