Germinal
Germinal (paragraphe n°1143)
Partie : Troisième partie, chapitre IV
Maheu se tut, travaillé à la fois de colère et de crainte. Etienne songeait d'un air sombre. De nouveau, ils traversèrent les groupes qui barraient la rue. L'exaspération croissait, une exaspération de peuple calme, un murmure grondant d'orage, sans violence de gestes, terrible au-dessus de cette masse lourde. Quelques têtes sachant compter avaient fait le calcul, et les deux centimes gagnés par la Compagnie sur les bois circulaient, exaltaient les crânes les plus durs. Mais c'était surtout l'enragement de cette paie désastreuse, la révolte de la faim, contre le chômage et les amendes. Déjà on ne mangeait plus, qu'allait-on devenir, si l'on baissait encore les salaires ? Dans les estaminets, on se fâchait tout haut, la colère séchait tellement les gosiers, que le peu d'argent touché restait sur les comptoirs.