Au Bonheur des dames

Au Bonheur des dames (paragraphe n°155)

Chapitre I

Cependant, Baudu criait plus fort, en accusant ce déballage d'en face, ces sauvages, qui se massacraient entre eux avec leur lutte pour la vie, d'en arriver à détruire la famille. Et il citait leurs voisins de campagne, les Lhomme, la mère, le père, le fils, tous les troisemployés dans la baraque, des gens sans intérieur, toujours dehors, ne mangeant chez eux que le dimanche, une vie d'hôtel et de table d'hôte enfin ! Certes, sa salle à manger n'était pas grande, on aurait pu même y souhaiter plus de jour et plus d'air ; mais au moins sa vie tenait là, il y avait vécu dans la tendresse des siens. En parlant, ses yeux faisaient le tour de la pièce ; et un tremblement le prenait, à l'idée inavouée que les sauvages pourraient un jour, s'ils achevaient de tuer sa maison, le déloger de ce trou où il avait chaud, entre sa femme et sa fille. Malgré l'assurance qu'il affectait, quand il annonçait la culbute finale, il était plein de terreur au fond, il sentait bien le quartier envahi, dévoré peu à peu.

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