La Curée – La serre et les amours monstrueuses de Maxime et Renée
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Qui lit La Curée ne peut en oublier les lieux : l’hôtel Saccard et son luxe débordant, l’austérité aristocratique de l’île Saint-Louis, les cafés des boulevards et les promenades impériales au Bois de Boulogne, Paris lui-même, complice de toutes les fêtes de « l’or et de la chair » sous le second Empire. Sans doute, dans le riche hôtel particulier d’Aristide Saccard, est-ce la serre exubérante qui fascine le plus : elle accueille les amours incestueuses de Maxime et Renée au chapitre IV du roman, dans un tableau mythique et fantastique, qui unit les entrailles de la terre, l’imaginaire floral et le rut des deux amants dans ce coin de forêt vierge en plein Paris mondain. Pour autant, Zola s’appuie sur une documentation précise qu’il accumule dès 1869 : visite des serres tropicales du jardin des Plantes, enquête de terrain dans l’hôtel particulier du chocolatier Menier, qui lui fournit la topographie végétale. La grammaire du dessin, de nature géométrique, permet la distribution raisonnée des plantes et du mobilier intérieur, notamment par le jeu des formes emboîtées qui rappellent les réseaux concentriques de Paris ou les allées circulaires de l’Exposition universelle de 1867. Une taxinomie de constructeur, qui s’inspire des grands schémas de l’époque, que l’écrivain transfigure, par le talent de son style, en un enfer dantesque de la passion dévoratrice.
Auteur
Emile Zola
Date
1870
Origine
La Curée, BnF, Mss, NAF 10282