Capitaine, vous accepterez bien un petit verre… Voyez-vous, je ne me gêne pas, je vous dis tout ce que je pense, parce que je connais la largeur de votre esprit. Eh bien ! je vous assure que votre préfet a tort de vouloir saigner encore la ville de ces quarante-deux mille francs… Songez donc au total de nos sacrifices, depuis le commencement. D’abord, à la veille de la bataille, toute une armée française, épuisée, affamée. Ensuite, vous autres, qui aviez les dents longues aussi. Rien que les passages de ces troupes, les réquisitions, les réparations, les dépenses de toute sorte nous ont coûté un million et demi. Mettez-en autant pour les ruines occasionnées par la bataille, les destructions, les incendies : ça fait trois millions. Enfin, j’évalue bien à deux millions la perte éprouvée par l’industrie et le commerce… Hein ? qu’est-ce que vous en dites ? nous voilà au chiffre de cinq millions, pour une ville de treize mille habitants ! Et vous nous demandez encore quarante-deux mille francs de contribution, je ne sais sous quel prétexte ! est-ce que c’est juste, est-ce que c’est raisonnable ?