Dans la remise, en bas, Jean et Maurice venaient en effet de trouver, assis sur une chaise de la cuisine, protégé par une seule petite table de bois blanc, un officier payeur qui, sans plume, sans reçu, sans paperasse d’aucune sorte, distribuait des fortunes. Il puisait simplement au fond des sacoches débordantes de pièces d’or ; et, ne prenant pas même la peine de compter, à poignées rapides, il emplissait les képis de tous les sergents du 7e corps, qui défilaient devant lui. Ensuite, il était convenu que les sergents partageraient les sommes entre les soldats de leur demi-section. Chacun d’eux recevait ça d’un air gauche, ainsi qu’une ration de café ou de viande, puis s’en allait, embarrassé, vidant le képi dans leurs poches, pour ne pas se retrouver par les rues, avec tout cet or au grand jour. Et pas une parole n’était dite, on n’entendait que le ruissellement cristallin des pièces, au milieu de la stupeur de ces pauvres diables, à se voir accabler de cette richesse, quand il n’y avait plus, dans la ville, un pain ni un litre de vin à acheter.